4.- Séraphin au grand magasin

4 novembre 2009

Si c'est votre première visite, avez vous pensé à lire à vos enfants le Prologue ?

Souvenirs personnels des bons anges gardiens de mes neveux

Mayeul, Clotilde, Domitille (Maguelonne est un peu petite encore ... quoique ... )

« Corentin ! Viens là ! Nous partons faire les courses », dit Maman. « Corentin ! Allons bonhomme, viens mettre ton manteau, il faut partir, laisse ton jouet, tu le retrouveras tout à l’heure.» Corentin abandonne alors à regret son petit train de bois et trottine jusqu’à Maman qui l’attend devant la porte d’entrée, le manteau de son bébé à la main. Le garçonnet attrape l’habit et le tire par la capuche : « Veux faire moi ! » Maman sourit et s’agenouille devant le bambin : « Voyons mon petit chat, tu es trop petit, je vais le faire ».

Séraphin aime beaucoup que Corentin mette son manteau à capuche. Il se roule alors en boule dans celle-ci et se laisse transporter par le garçonnet. Ne dépassent que le bout de son nez et les pointes de ses deux ailes et comme il est très léger, plus léger que le plus léger des souffles d’air, Corentin ne sent rien ; il ne sait pas qu’il porte un ange sur son dos.

A l’approche du grand magasin, Corentin trépigne de joie. Toutes ces lumières, toutes ces couleurs et tous ces gens, c’est un peu féerique pour le bout de chou. Mmmmmm la bonne odeur de pain chaud ! Il sait que maman va lui donner le croûton de la baguette et qu’il pourra le déguster assis dans le caddie tandis qu’elle déambulera à travers les rayons. Séraphin, lui, aime beaucoup moins cet endroit. C’est trop grand, il y a trop de gens et trop de bruit. Un grand magasin, c’est trop compliqué à surveiller pour un petit ange gardien débutant.

Comme Noël approche, la boutique est pleine de monde. Maman a du mal à se frayer un chemin dans les allées encombrées de caddies et de poussettes. Mais Corentin, lui, s’amuse beaucoup. Il rit aux éclats et tape dans ses mains dès que Maman accélère le mouvement. Pendant ce temps Séraphin s’est arrêté dans le rayon des balais et des serpillières. Les petits anges, comme les petits enfants, sont très curieux et il y a là une chose qui a attiré l’œil de l’angelot : un plumeau.

Séraphin l’observe avec la plus grande attention. Il fronce les sourcils, l’air étonné, tend le cou et s’approche encore jusqu’à enfouir son petit nez dans le rayon de plumeaux: « Mais, c’est tout doux, se dit-il, mais on dirait… on dirait des plumes d’ange… des plumes d’ange rose… mais… mais, on va me couper les ailes pour en faire ces choses ? C’est cela ? » Un éclat de rire fait sursauter Séraphin. Le petit ange se retourne brutalement. C’est l’archange Gabriel ! « Séraphin, Séraphin, que vas-tu croire là ? Les plumeaux sont fait avec des plumes d’autruche pas avec des plumes d’anges voyons. Mais dis moi, comment se fait-il que tu sois si loin de ton protégé ? » Séraphin rougit, se cache les yeux derrière ses ailes et penaud baisse la tête.

Même si les yeux de l’archange sourient, il prend une grosse voix : « Séraphin, combien de fois te l’ai-je dit ? Jamais tu ne dois t’éloigner de l’âme que tu gardes. Sans toi, elle court les plus graves périls ! Va vite la retrouver ! » La retrouver se dit Séraphin … mais où ? Dans quel rayon ? L’ange est perdu dans cet endroit si vaste. Tout confus il n’ose demander conseil à l’Archange. Il n’y a plus qu’une seule solution : survoler les rayons les uns après les autres à la recherche de Corentin.

Maman est toute essoufflée de pousser le caddie qui est maintenant plein. Corentin commence aussi à s’impatienter. Le petit bonhomme trouve que c’est un peu long tout de même de rester assis sans pouvoir bouger. Il s’agite et se trémousse dans tous les sens. Il voudrait que Maman le sorte de là. Il lui tend ses petit bras, mais elle lui demande de patienter encore un peu : « c’est bientôt fini mon chat. Je vais chercher du lait et je reviens ». Maman s’éloigne alors. Pas très loin, juste de quelques pas.

Les minutes passent et Maman ne revient pas. Corentin tourne la tête et la voit. Elle essaie d’attraper quelque chose pour une vieille dame trop petite. Le petit coquin en a vraiment assez de ces courses qui n’en finissent pas. Ce n’est plus drôle du tout à la fin. Il a faim, il est fatigué, il veut retrouver ses jouets et son petit lit. Comme Maman n’arrive toujours pas, le bambin sort une jambe, puis une autre et se lève. Il est maintenant debout sur le petit siège du caddie.

Séraphin vole de rayon en rayon. Son petit cœur bat très vite. A plusieurs reprises il croit reconnaître Corentin, il s’approche plein d’espoir mais se rend compte dépité que ce n’est pas lui. Alors il reprend son survol du magasin. Le bambin est nulle part. Ni au rayon des gâteaux, ni à celui des légumes. Personne non plus à l’étal du boucher ou à celui du poissonnier. Séraphin a la gorge serrée. Tout à coup il l’aperçoit. Là ! Vers les yaourts ! C’est lui, pas de doute ! C’est Corentin ! Mon Dieu, il est debout, il vacille !

Séraphin accélère encore, il rassemble ses ailes le long de son petit corps et fonce en piquet sur l’enfant. Mais comme l’angelot ne sait toujours pas maîtriser le freinage, il s’écrase sur une pile de boîte de conserve qui s’écroule dans un grand fracas. Entendant ce bruit soudain, Maman qui écoutait patiemment les remerciements de la vieille dame, tourne la tête et voit son bonhomme en équilibre sur le caddie. Elle se précipite et atteint l’enfant au moment même où il allait basculer dans le vide.

Encore un peu étourdi après sa chute brutale, Séraphin reste quelques instants assis par terre le temps de reprendre ses esprits. « Tu as décidément de drôles façons de remplir tes missions Séraphin », lui dit l’archange, venu le rejoindre. « Mais nous sommes fiers de toi car jamais tu ne perds courage » Sur ces mots, Gabriel se baisse et délicatement prend dans ses bras le petit ange pour le déposer dans la capuche de Corentin.